1. Dispositions légales
Région wallonne – Décret wallon du 15 mars 2018 relatif au bail d’habitation
Exigence d’un écrit
Article 3.
§ 1er. Tout bail est établi par un écrit.
Cet écrit contient à tout le moins :
1° l’identité de toutes les parties contractantes, à savoir :
a) pour les personnes physiques, leurs nom et deux premiers prénoms, leurs domicile, date et lieu de naissance;
b) pour les personnes morales, leur dénomination sociale et leur numéro d’entreprise visé à l’article III, 17°, du Code de droit économique; à défaut de s’être vu attribuer le numéro d’identification précité, celui-ci est remplacé par le siège social;
2° la date de prise en cours;
3° la durée du bail;
4° le type de bail;
5° la désignation de toutes les pièces et parties d’immeuble couvrant l’objet locatif;
6° le montant du loyer hors charge;
7° le montant et la nature des charges communes éventuelles;
8° le montant et la nature des charges privatives si celles-ci ont un caractère forfaitaire;
9° l’indication du caractère forfaitaire ou provisionnel des charges privatives et communes éventuelles;
10° dans le cas d’immeubles à habitations multiples, si le montant des charges n’est pas forfaitaire, le mode de calcul des charges et la répartition effectuée;
11° la mention de l’existence de compteurs individuels ou collectifs.
12° la date du dernier certificat PEB lorsque celui-ci est requis par le décret du 28 novembre 2013 relatif à la performance énergétique des bâtiments ainsi que l’indice de performance attribué au bien loué.
Concernant le 1°, b), lorsqu’une partie à un tel acte ne s’est pas encore vu attribuer de numéro d’entreprise, elle le certifie dans l’acte ou dans une déclaration complétive signée au pied de l’acte.
La partie qui manque à son obligation d’identification par le numéro visé à l’alinéa 2, supporte toutes les conséquences de l’absence d’enregistrement du bail.
§ 2. Le Gouvernement rédige une annexe pour chaque type de baux, contenant une explication synthétique et pédagogique des dispositions légales relatives aux éléments suivants :
– les dispositions en matière de normes de salubrité, sécurité et habitabilité; une explication sur la nature d’une règle impérative;
– les dispositions relatives au bail écrit, à son enregistrement et à la gratuité de l’enregistrement;
– la durée du bail;
– les possibilités de révision du loyer, l’indexation, les charges;
– les règles établies en matière de réparations locatives; les possibilités de mettre fin au bail et les dispositions y afférentes ;
– les dispositions liées au changement de propriétaire; les possibilités pour les parties de pouvoir être assistées en cas de litige. Cette annexe est obligatoirement jointe au contrat de bail.
§ 3. La partie contractante la plus diligente peut, faute d’exécution dans les huit jours d’une mise en demeure signifiée par envoi recommandé ou par exploit d’huissier, contraindre l’autre partie, par voie procédurale s’il y échet, à dresser, compléter ou signer une convention écrite selon le paragraphe 1er et requérir si besoin que le jugement vaille bail écrit.
La compétence du juge est limitée par l’existence préalable d’un contrat oral entre les parties.
§ 4. Le Gouvernement arrête un modèle-type de contrat de bail à valeur indicative.
§ 5. Les paragraphes 1er et 3 sont impératifs.
Preuve du bail
Article 4.
Si le bail fait sans écrit n’a encore reçu aucune exécution, et que l’une des parties le nie, la preuve ne peut être reçue par témoins, quelque modique qu’en soit le prix, et quoiqu’on allègue qu’il y a eu des arrhes données.
Le serment peut seulement être déféré à celui qui nie le bail.
2. Chronique
Exigence d’un bail écrit
L’article 3 du décret wallon relatif au bail d’habitation prescrit que tout bail d’habitation doit être conclu par écrit. La généralisation de l’écrit pour les baux d’habitation est donc consacrée de manière légale et impérative.
Cet écrit doit comprendre un certain nombre de mentions telles que l’identité des parties, la date de prise d’effet du bail, la durée du bail, le type de bail, la désignation de toutes les pièces ou parties d’immeuble louées, le montant du loyer hors charge, le montant et la nature des charges communes éventuelles, le montant et la nature des charges privatives, etc.
L’écrit ayant un caractère impératif, son absence fait l’objet d’une sanction particulière. En effet, l’article 3§4 du décret wallon prévoit que la partie la plus diligente pourra contraindre l’autre à dresser, compléter ou signer une telle convention, voire, si besoin en est, requérir que le jugement vaudra écrit.
L’examen du juge se limite à constater l’existence d’un bail verbal par écrit. La poursuite des pourparlers n’étant pas en soi suffisante.
La compétence du juge ne peut cependant être offerte à la partie diligente que si cette dernière à mise en demeure par lettre recommandée la partie contractante récalcitrante, tout en lui laissant un délai de huit jours pour s’exécuter.
Le législateur wallon a également prévu une obligation d’annexe pour chaque type de bail. Ces annexes ont pour but de fournir une explication « synthétique » dans diverses matières telles que la salubrité, l’habitabilité, l’impérativité d’une règle, durée du bail etc…).
De plus, les parties doivent désormais annexer au bail un état des lieux d’entrée effectué de manière contradictoire et à frais communs (article 27 du décret). Il devra donc être présenté à l’enregistrement dans le même temps que le bail.
Preuve du bail d’habitation
L’article 4 prévoit que » Si le bail fait sans écrit n’a encore reçu aucune exécution, et que l’une des parties le nie, la preuve ne peut être reçue par témoins, quelque modique qu’en soit le prix, et quoiqu’on allègue qu’il y a eu des arrhes données.
Le serment peut seulement être déféré à celui qui nie le bail »
Cet article est en quelque sorte une reproduction de l’ancien article 1715 du code civil pour le bail de droit commun. Néanmoins, une différence a lieu suivant que le bail a ou non reçu un commencement d’exécution.
En effet, la preuve testimoniale et la preuve par présomption ne sont pas admises pour les contrats de bail d’habitation qui ne sont pas conclus par écrit et qui n‘ont pas reçu un commencement d’exécution.
Cette interdiction a une portée assez large en ce qu’elle perdure lorsqu’il existe un commencement de preuve par écrit, en cas d’impossibilité de se procurer une preuve par écrit pour des raisons autres qu’un cas fortuit, et même lorsque le loyer a une valeur inférieure à 375 EUROS.
In concreto, seule la preuve par écrit, par serment ou par aveu est donc envisageable.
Précisons également que l’article 4 précité ne concerne que le cas où l’existence du contrat de bail est sujette à discussion. En effet, tout le pan contentieux relatif à la preuve de l’entendue des obligations respectives des parties relève du droit commun des obligations.
Pour les baux d’habitation ayant déjà reçu un commencement d’exécution, l’article 4 du décret (ancien article 1715 du Code civil) n’est donc pas applicable. Le commencement d’exécution du bail peut être vu par le juge comme un aveu extrajudiciaire de son existence.
Néanmoins, si l’exécution du bail est contestée, elle ne pourra, à l’instar de l’existence du bail, être établie par témoignage ou présomption. La preuve d’un bail de résidence principale verbal dont l’existence et l’exécution sont niées par le bailleur ne peut être prouvée par témoignage (Juge de pax de Westerlo, 22 juin 2009, J.J.P., 2011).
Il est vrai que le paiement du loyer est un instrument de preuve couramment retenu devant les tribunaux; encore faut-il relever qu’il s’agit souvent de voir débattre des modalités d’exécution (point de départ du bail, montant du loyer …) d’un bail incontesté dans son principe; au surplus, il est exact que la doctrine ajoute l’aveu au rang des preuves admises avec le serment et qu’au titre d’aveu extrajudiciaire un paiement dont il serait établi que la cause en est à trouver dans l’extinction d’une dette de loyer, pourrait prouver l’existence d’un bail dont l’exécution ne serait pas autrement établie (cf. DE PAGE, op. cit., n° 542).
Dans une décision de la Justice de paix de Fontaine l’Evêque du 20 mars 2008, tout en indiquant que « la quittance de loyer, qui sans ambiguïté contient un aveu, établit non seulement le commencement d’exécution, mais prouve aussi le bail lui-même », elle en conclut au cas d’espèce qu’il n’a pas été admis que les quittances vantées eussent pour cause, dûment établie, l’extinction d’une dette de loyer, les quittances paraissant « suspectes compte tenu des circonstances particulières de la cause »; par ailleurs, les preuves de paiement de certaines sommes ne sont pas davantage probantes puisque ces pièces n’émanent pas du prétendu bailleur et ne sauraient être constitutives d’aveu par ce fait même.
Pour un examen complet des problèmes de preuve du bail, on consultera utilement J. VANKERCKHOVE e.a., « Le louage de choses. Les baux en général », Nouvelles, 2000, p. 114 et s.