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Transmission d’un bien loué

Chronique

Date de prise de cours du délai de préavis 
Lors de l’aliénation d’un bien loué, l’acquéreur est subrogé aux droits et obligations du bailleur lorsque le bail a date certaine antérieurement à l’aliénation du bien loué. Cette subrogation s’opère à la date de passation de l’acte authentique et non  à la date de transcription de l’acte authentique (Voy. J.P., Saint-Gilles, 12 octobre 2000, R.G.D.C., 2001).

Primauté de l’intérêt de l’acquéreur 
Le bailleur a droit de vendre le bien qu’il loue sans en avertir préalablement le locataire.
La vente du bien loué n’entraine pas l’extinction du contrat de bail en cours. Ainsi, l’acquéreur du bien est tenu de respecter le bail lorsqu’il a date certaine antérieure à la date de l’acte authentique de vente.
Si le bail ne dispose pas d’une date certaine, une protection est accordée au preneur qui réside dans le bien loué depuis plus de six mois au moins. L’acquéreur ne pourra l’expulser que dans les conditions de résiliation du bail prévu en matière de bail de résidence principale, à savoir un congé de trois mois, lequel doit être notifié dans les trois mois qui suivent la passation de l’acte de vente. Dans cette hypothèse, le locataire peut toujours invoquer des circonstances exceptionnelles pour obtenir une prorogation du bail.
A cet effet, le juge de paix a soutenu que l’intérêt de l’acquéreur prime sur celui du locataire  lorsque les parties peuvent faire valoir des intérêts d’importance comparable. (J.P. Bruges, 14 avril 2017, J.J.P., 2018/3-4).

Opposabilité à l’acquéreur d’un bail renouvelé, tacitement reconduit et prorogé
Il est acquis, selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation (Cass., 17 juin 1966, Pas., 1966, I, p. 1326; Cass., 13 février 1976, Pas., 1976, I, p. 655; Cass., 11 septembre 1987, Pas., 1988, I, p. 41), que l’effet de la date certaine du bail originaire (commercial dans les cas visés) ne s’étend pas au bail renouvelé.

Le renouvellement d’un bail donne naissance à un bail nouveau, ce qui semble fonder la jurisprudence de la Cour de cassation qui conduit à imposer au locataire de prendre des mesures spécifiques pour donner date certaine au bail renouvelé (Simont, De Gavre et Foriers, R.C.J.B., 1985, p. 318 et 319, n° 107).

Lorsque le bail est tacitement reconduit, bien que la réalité juridique soit la même, il est à distinguer d’un point de vue pratique. La reconduction tacite du bail, au contraire de son renouvellement, ne nécessite, par définition, aucune initiative particulière de quiconque (J. Vankerckhove e.a., «Le louage de choses, les baux en général», Novelles, 2000, p. 327 et 328, n° 494).

Dans cette optique, en cas cette fois de prorogation automatique par l’effet de la loi, le bail verra sa durée prolongée opposable à l’acquéreur si le bail «originaire» avait date certaine (M. Van Wijck- Alexandre et L. Herve, Act. Dr., p. 533).

En revanche et quand bien même il ne s’agit pas juridiquement d’un bail nouveau, le bail prorogé par accord de volontés survenu postérieurement à la conclusion du contrat originaire, ne le sera que si l’accord survenu postérieurement a lui- même date certaine.

L’on en revient ainsi au fondement essentiel mis en exergue par Henri De Page. C’est la nécessité de protéger l’acquéreur contre les fraudes et les risques d’anti-dates (H. De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, T. IV, partie 1, n° 764) qui sous-tend l’ensemble du mécanisme.
Qu’il s’agisse d’un bail renouvelé, reconduit ou prorogé, l’acquéreur ne doit le respecter qu’en l’absence de tout risque d’être victime d’une entente, postérieure à la vente, entre le bailleur-vendeur et le locataire.
La réalité des faits prime ainsi les caractéristiques juridiques du mécanisme quel qu’il soit (Voy. M. Vlies, « les conditions de l’opposabilité à l’acquéreur d’un bail renouvelé, tacitement reconduit ou prorogé », J.J.P., p. 350, 2019/7-8).

Obligation de réparation 
Le bailleur est toujours tenu de son obligation de réparation jusqu’à la vente. A partir de ce moment, l’acquéreur étant subrogé dans les droits du vendeur, c’est ce dernier qui est tenu de cette obligation.
Dans un jugement, le juge de paix de Fléron a prononcé la résolution au tort de l’acheteuse bien que le trouble de jouissance ait été antérieur à la passation de l’acte authentique. Pour justifier cette décision, le juge a estimé que les anciens bailleurs n’avaient plus cette qualité (de bailleurs) à la date sollicitée pour la résolution.  Le juge a toutefois fait droit à l’action en garantie intentée à leur égard par l’acheteuse (J.P. Fléron, 28 octobre 2014, J.J.P., 2016/5-6).

Garantie locative 
L’acquéreur étant subrogé dans les droits et obligations du vendeur, celui-ci est tenu de restituer la garantie locative au locataire (mécanisme de la subrogation de plein droit). Cependant, il se peut que le bailleur n’ait pas transmis cette garantie à l’acquéreur-bailleur. A ce titre, le bailleur originaire qui a conservé les sommes au titre de garantie locative répond seul de sa restitution, et ce, malgré l’aliénation du bien loué J.P. Liège, 14 février 2002, Echos log., 2002; cass. 27 juin 1946, Pas. 1946).

Clause contractuelle opposable à l’acquéreur 
Le contrat de bail peut également prévoir des clauses limitant la faculté du bailleur de résilier anticipativement le bail pour occupation personnelle (possibilité offerte qu’au seul bailleur et non pas à d’autres membres de sa famille). Dès lors, en cas d’aliénation d’un bien loué, l’effet de cette clause reste valable à l’égard de l’acquéreur. Ainsi, la subrogation légale édictée par l’article 63 du décret sort ses effets à la date de l’acte authentique, date à laquelle les acquéreurs sont subrogés dans tous les droits et obligations du vendeur qu’ils soient de nature légale ou contractuelle. L’acquéreur est donc lié par les clauses contractuelles limitant les possibilités de résiliation anticipée (J.P. Fontaine l’Evêque, 15 septembre 2016, J.L.M.B., 2018/4)

Bail sans date certaine 
Si le bail n’a pas de date certaine mais que le locataire occupe les lieux depuis au moins six mois, l’acquéreur a la possibilité de mettre fin au bail dans les conditions de l’article 55 du décret moyennant un congé de trois mois. Ce congé doit être notifié dans les trois mois de la passation de l’acte authentique. En agissant de la sorte, l’acquéreur-bailleur ne contrevient pas à son obligation de garantir la jouissance paisible du bien loué (J.P. Seneffe, J.J.P., 2005)

Tout d’abord, l’article 40 du décret wallon n’est ni d’ordre public ni impératif. Les parties sont donc pleinement libres d’y renoncer ou d’aménager des clauses dérogatoires.
Le bailleur a donc la faculté d’insérer dans la convention de vente une clause de maintien ou d’entretien du bail.
Une telle clause a pour effet que l’acquéreur renonce dans l’acte de vente au bénéfice de l’article 40 du décret. Ce dernier doit dès lors respecter le contrat de bail en cours et ce, même si celui-ci ne présente aucune date de certaine.
Un contrat de bail peut également prévoir l’expulsion du locataire dans l’hypothèse où le bail aurait date certaine en cas de vente du bien loué (ou une partie Cass, arrêt du 26 mai 1955)
L’acquéreur dispose ainsi d’une faculté de résiliation unilatérale anticipée.
Néanmoins, cette faculté est subordonnée à deux conditions :
– l’acquéreur doit respecter un préavis et,
– le preneur dispose d’un droit de rétention si l’indemnité d’éviction qui lui est due ne lui a pas été octroyée.

En cas d’expulsion, le contrat de bail (ou à défaut de stipulation en ce sens, le législateur) accorde une indemnité  correspondant au montant égal au prix du loyer, pendant le temps qui est accordé entre le congé et la sortie.
L’article 43 du décret prévoit ce pouvoir de rétention du preneur : le locataire ne peut être expulsé tant que les dommages et intérêts dus conventionnellement ou légalement ne lui ont pas été versés.


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